Le blog de michel koppera
"Les ardents de la Rue du Bois-Soleil", # 18
Comme on était samedi et qu’il faisait beau, j’étais venu en short de sport. Déjà, les premiers vacanciers avaient pris possession de la plage. Certes l’eau était encore un peu froide pour se baigner, mais le soleil de juin autorisait les siestes paresseuses en maillot de bain sur le sable tiède.
La porte de l’appartement 9 était entrouverte, comme dans les films de gangsters lorsque le détective découvre le cadavre de son indic égorgé dans la salle de bains.
- C’est toi, Tristan ? Tu peux entrer, je suis au salon !
Elle lisait. Les genoux relevés, elle avait ramené ses pieds nus sur le canapé, le livre ouvert posé sur ses cuisses. Elle portait une jupe plissée, rouge à pois blancs, ample, mais pas assez longue pour me cacher le spectacle de sa croupe. J’eus ainsi droit à une longue contemplation, en vue de trois-quarts, de ses cuisses nues, de son cul et du splendide bombé que dessinait sa culotte blanche dans l’ombre de son entrecuisses.
- Qu’est-ce que tu attends ? Tu connais le chemin ! À tout à l’heure !
Dans sa chambre, Jean avait la mine des mauvais jours.
- T’as vu ma tante ? Aujourd’hui, elle n’est pas commode, ma présence doit la gêner : elle avait sans doute prévu de sortir. Je la contrarie. Vivement que je puisse retourner au lycée !
- T’en as encore pour longtemps ?
- Le médecin est passé ce matin. Ça évolue mieux que prévu : il pense que je pourrai me lever et marcher mardi ou mercredi… Parle-moi de ce qui se passe dehors. Il doit faire un temps superbe puisque tu es en short…
Je ne me fis pas prier pour lui raconter l’arrivée des premières Anglaises, à la peau très blanche, qui venaient de prendre pension dans les hôtels du front de mer. On mit au point des stratégies de drague – Jean était convaincu que son genou bandé et les béquilles seraient d’excellents arguments de séduction – soupesant les avantages et les inconvénients respectifs de la chasse en solitaire ou en duo, réfléchissant à la langue du premier contact : anglais ou français ?
- Pour moi, l’idéal serait de séduire une femme divorcée, encore jeune… La trentaine, mettons, dit Jean d’un air rêveur. À cet âge-là, elles savent déjà des tas de trucs en amour, et ça ne me coûterait rien !
- En bref, tu t’imagines en gigolo !
- Si tu veux. Il me semble pourtant qu’un gigolo, c’est un jeune qui vit aux crochets d’une vieille. Et trente ans, c’est pas vieux. Ma tante, oui, voilà une vieille !
J’accusai le coup sans broncher, mais cette brutale irruption de Geneviève dans notre conversation ralluma mes désirs un instant assoupis. Tant et si bien que je n’eus bientôt plus qu’une idée en tête, la rejoindre. Cependant, je parvins à dissimuler mon impatience. Tout en écoutant les nouveaux tubes anglais de Salut les Copains sur Europe 1, on parla donc encore des grandes vacances à venir, de notre passage en terminale, des chances de Michel Jazy aux prochains jeux olympiques de Tokyo, des favoris du Tour de France qui allait passer pas très loin de chez nous pour la deuxième étape entre Lisieux et Amiens…
- Dommage que ce soit un lundi, sinon on aurait pu aller voir ça !
à suivre...