Le blog de michel koppera

Nicole Avril : "Jeanne", roman paru en 1984 chez Flammarion. Edité en poche collection "J'ai lu" n° 1879 (222 pages)

Dans ce roman qui se revendique féministe, Nicole Avril accumule les clichés sur la "femme puissante". Jeanne, l'héroîne éponyme du récit, est en tout une femme "hors-normes" qui multiplie les voyages en classe affaires, d'un continent à l'autre, toujours en transit... 

-Hors-normes professionnellement puisqu'elle occupe un poste habituellement réservé aux hommes : grand ponte international de la chirurgie cardiaque.

- Hors-normes socialement puisqu'elle est célibataire et qu'elle collectionne les amants richissimes.

- Hors-normes physiquement puisqu'elle est rousse dont potentiellement sulfureuse.

C'est cette femme extra-ordinaire qui, confrontée au désir, va devoir affronter deux trangressions majeures : elle est courtisée par Mathieu, un adolescent à la sensibilité à fleur de peau et issu d'un milieu très défavorisé. 

Extrait : pages 122-123

" Mathieu n'avait pas osé aller jusqu'à Jeanne pour lui dire bonjour. Il était appuyé au chambranle de la porte et il la dévisageait. (...) Le désir l'avait envahi à son insu et il semblait que rien ni personne n'eût pu faire dévier son regard. (...)

Le désir. Son visage exprimait le désir, jusqu'à l'indécence. Jeanne se souvint brusquement du bazar d'Istanbul et de cet homme qui, les pieds dans le caniveau, la contemplait de ce même regard fixe en se masturbant. Indifférente à son désir et à son acte, la foule ruisselait sur le trottoir et dans la rue. L'homme lui volait son image, son corps, et gémissait doucement en la regardant passer. Que dire ? Que faire ? L'homme s'était emparé d'elle. Il ne s'agissait pas d'un viol mais d'un geste magique de possession. Jeanne avait eu la tentation de fuir, puis, se ravisant, elle avait poursuivi sa promenade à son rythme. Elle sentait que sa disparition ne changerait rien à la jouissance de l'homme. Il avait déjà fixé en lui son image et Jeanne n'avait pas le pouvoir de la lui reprendre. On peut casser un appareil photo. En revanche, la violence ne fait qu'exacerber le désir. Jusqu'au soir, Jeanne avait erré dans les ruelles d'Istanbul avec un sentiment mêlé de dégoût et de regret. Il y avait de par le monde tant de fleuraisons dont elle ne connaîtrait jamais la monstrueuse éclosion."

jeanne avril


Mar 28 sep 2021 Aucun commentaire