Le blog de michel koppera
Editions J.C. Lattès, collection « Les classiques interdits », 1980.
Les « Tableaux des mœurs du temps dans les différents âges de la vie » furent imprimés en un seul exemplaire en 1745. Il s’agissait d’une commande du certain Fermier Général de La Popelinière. Ces tableaux sont sans doute l’œuvre de Crébillon Fils. Voici une scène qui mêle couleurs de peau et découverte du divin gode ( pages 297-298 de la présente édition.)
« Kalibeka était toute nue, debout entre les cuisses d’une jeune négresse, qui s’était assise sur un carreau et de chaque main lui empoignait le bas de la jambe, pendant qu’elle avait le visage collé, ou sur son ventre, ou sur ses cuisses, et lui léchait incessamment, et avec un air d’avidité, toute cette partie du devant de son corps. Zaïrette, en même temps, aperçut deux autres négresses beaucoup plus petites ; elles étaient debout derrière elle, embrassaient ses genoux et promenaient leur langue, avec une prestesse admirable et à l’envi l’une de l’autre, le long de ses cuisses, sur ses fesses et sur tout le contour de son cul, qui, parmi ces figures noires, paraissait d’une blancheur extrême et d’une grande beauté.
Zaïrette fit beaucoup attention à cette nouvelle cérémonie, qui l’occupa et la réjouit un instant. Kalibeka, entre ces négresses, se remuait, s’agitait ou pirouettait incessamment…
Tout cet exercice avait été entrecoupé de paroles de part et d’autre si vives, même de quelques cris si souvent répétés, qu’on eût cru entendre une querelle, si l’on n’eût pas vu que ce n’était qu’un jeu. Mais alors il y eut un profond silence, et qui dura quelques moments. Kalibeka se réveilla enfin comme d’un sommeil ; elle se releva, soutenue par ses négresses, et se plongea dans un bain. Les trois jeunes négresses se retirèrent : il en vint une autre qui l’étuva et la parfuma avec une promptitude et une adresse extraordinaires.
Kalibeka sortit du bain. Zaïrette comprit qu’on allait l’habiller ; elle revint et se rapprocha du lit où cette dame l’avait laissée. Elle allait s’y asseoir, lorsqu’elle y remarqua un instrument que la dame avait oublié d’emporter avec elle ; elle crut d’abord que c’était une espèce de fruit du pays, étant pointu par un bout, où elle voyait la forme d’un bouton de rose vermeil ; mais elle le prit et se détrompa quand elle le vit couvert de velours de la même couleur. Elle mesura ; il était plus long que sa main. Elle l’empoigna ; c’est tout ce qu’elle put faire. Elle le sentit assez ferme du toucher, sans être dur ; elle prit garde à deux petites boules qui tenaient à l’autre bout ; elle les pressa de la main tout de même, et alors qu’elle fut assez surprise de voir qu’autant de fois elle pressait il jaillissait, à la pointe de ce bouton de rose, un filet d’eau d’une odeur douce et agréable. Zaïrette comprit d’abord l’usage auquel ce petit instrument était destiné… »