Le blog de michel koppera
James Patrick DONLEAVY, Les béatitudes bestiales de Balthazar B
Paru aux USA en 1968, et en France en 1973 aux éditions Denoël ( texte traduit par Suzanne Mayoux). Le présent extrait est tiré de l’édition Folio n° 987 de 1977 ( dessin de couverture signé Siné )
Donleavy est surtout connu pour son roman « L’homme de Gingembre » dont je vous recommande chaudement la lecture. Il est né en 1926 à New York, mais réside en Irlande.
Pages 394-395
« Fitzdare alla sur la pointe des pieds tourner la clé dans ma serrure. Et revint souriante vers mon lit, en
robe de soie noire ouverte sur son pyjama d’homme couleur lavande. Elle se mordait la lèvre inférieure et ses yeux brillaient d’une lueur maligne que je n’y avais jamais vue auparavant. Je
redoutais que ce fût encore un rêve. ( …)
Oui, regarde et touche par toi-même tout ce que tu voudras. Cette chambre était celle d’un roi avant d’être celle de ma mère, il y a des siècles de cela, et sa maîtresse lui rendait visite. Moi je ne veux pas perdre de temps. Alors je suis venue aussi. Avant que tu partes. Que tu ailles à Londres. Peut-être pour ne plus jamais revenir. Mais pour le moment. En un clin d’œil nous avions quitté nos pyjamas. Ses seins apparaissaient si gros et si blancs dans sa totale et bouleversante réalité que j’en restai stupéfait. Tout ce qui était caché sous la laine. Les muscles de son ventre, la force de ses jambes. ( ..) Fitzdare poussait des grognements, des gémissements, des grondements. M’empoignait farouchement par la perpendiculaire et trop fermement par les couilles. Ce qui m’arracha un petit cri de douleur. Elle s’écarta, dit pardon. Pose encore ta main ici, mais un tout petit peu plus doucement. Pousser, enfoncer ma verge lentement, de plus en plus loin. Sur elle, ici. Sa fente. Si petite semble-t-il qu’il n’y a pas de place pour y entrer. Mais j’y suis entré. Elle m’enveloppe de toutes parts. Et me dit non, personne ne m’a jamais pénétrée. C’est si difficile de penser que je suis le premier. Pourtant c’est vrai dit-elle…
Pages 425-426. Balthazar est à Paris
J’avais des récits à faire. Que je taisais. D’une promenade à Pigalle. Où je ramassai la pièce qu’avait laissée
tomber au passage une fille en robe orange moulante, aux cheveux noirs raides et brillants. Je la lui tendis, elle me dit qu’elle allait m’offrir un verre de vin.
Nous nous sommes assis dans un café devant deux rouges. Au léger goût douceâtre de produit chimique. Elle ne cessait de sourire en me regardant dans les yeux. Elle venait de sa campagne du côté de Metz. Nous faisions tourner nos petits verres en forme de cheminée de bateau. Ses yeux noirs, sa peau brunie. Par tous les étés passés à vendanger disait-elle. Et vous, dit-elle aussi, vous n’êtes que mon deuxième client, je suis nouvelle dans le métier. C’est parce que vous êtes si beau que je ferai ça gratis pour le plaisir. Nous restions là, et je ne savais que faire ni que dire jusqu’à ce qu’elle posât sa main sur la mienne et dît, allez viens, ce que tu es timide. Je vidai un cognac et la suivis en haut d’un escalier étroit dans sa petite chambre. Mon corps inerte depuis Fitzdare. Elle raconta que la première fois qu’elle était venue à Paris, elle avait habité en face des abattoirs de l’autre côté du canal, et que l’odeur s’attachait à sa peau. Elle flaira son bras et se mit à rire. Elle se déshabilla. Au mur une petite image de Sainte Agnès, avec un soldat l’épée levée sur elle liée par les chevilles à un poteau. La fille bomba le buste, fit saillir ses seins, dit qu’elle ne savait pas l’âge qu’elle avait mais que ça devait tourner autour de dix-sept ans. Avec tout l’argent qu’elle allait gagner, elle achèterait une ferme. Elle ne me quitta pas des yeux pendant que je me déshabillais à mon tour et dit, vous êtes comme j’imagine que doit être un prince, tout frêle, tout blanc, tout maigre. Elle avait la peau glissante, couverte de sueur au long de cet après-midi parisien.