Le blog de michel koppera

Le texte de "Lucius ou l'âne" est daté du deuxième siècle. Son auteur, Lucien (120-200) était originaire de Syrie. Homme politique, philosophe, il séjourna pendant 20 ans à Athènes. Dans Lucius, il raconte en un peu plus de 60 pages les mésaventures de Lucius, beau jeune homme métamorphosé par mégarde en âne. Pour retrouver sa forme hmaine, il lui faut manger une rose qu'évidemment il ne trouvera qu'à la fin de ses pérégrinations. Le récit est à la première personne, le lecteur se retrouve lui aussi dans la peau de l'âne. On peut dire que c'est une approche assez originale de la condition animale, où la bête est avant tout un outil et traité comme tel. L'épisode le plus connu et le plus érotique se situe vers la fin de l'histoire à Thessalonique lorsqu'une femme l'accueille dans son lit. Voici ce passage 
      lucius.jpg " C'est alors qu'une femme étrangère, très riche et assez jolie, étant entrée dans mon appartement et m'ayant vu dîner, tomba chaudement amoureuse de ma personne. Ma beauté d'âne, jointe à la merveille de mes talents, lui donna le désir d'avoir un tête-à -ête avec moi. Elle s'abouche avec mon gouverneur et lui promet une grosse somme, s'il consent à me laisser coucher une nuit avec elle. Lui, sans se soucier si elle pourrait ou non faire de moi quelque chose, commence par prendre l'argent.
        zoo-18-eme.jpg Lorsque le soir est venu et que le maître nous a renvoyés du festin, nous revenons à notre logis, où nous trouvons la dame qui, depuis longtemps, était arrivée au rendez-vous. On avait apporté de moelleux coussins et des tapis, dont on nous fait un lit par terre ; après quoi, les esclaves de la dame se retirent et se couchent devant la porte de la chambre. Alors elle allume une grande lampe qui jette une vive clarté, se déshabille, et se tenant toute nue à la lumière, elle verse du parfum d'un vase d'albâtre, s'en frotte, m'en frotte aussi, et m'en remplit particulièrement les narines. Ensuite elle me couvre de baisers, me parle comme elle eût fait à son amant, et, me prenant par le licou, m'attire sur le lit. Je n'avais pas besoin d'y être engagé par un tiers : le vin vieux dont j'avais bu une rasade, l'odeur du parfum qui me stimule, et la vue de cette femme belle de tout point, me font me pencher sur elle. Mais j'étais fort embarrassé de savoir comment la satisfaire ; car, depuis que j'étais âne, je n'avais point fait l'amour comme mes pareils, ni caressé aucune ânesse. Ma plus grande crainte était surtout de déchirer cette femme, vu la disproportion qui existait entre nous deux, et d'avoir ensuite un beau procès pour homicide. J'ignorais combien j'avais tort de le craindre. Cette femme, après m'avoir engagé par mille baisers amoureux, voyant que je ne répondais pas à ses désirs, se couche sous moi comme sous un homme, m'enlace, et, se soulevant, me reçoit tout entier. Moi, pauvre, je craignais encore et je me retirais tout doucement, mais elle s'attacha si fortement à mes reins, poursuivant toujours le fugitif qu'il ne me fut plus possible de me soustraire. Quand je fus sûr qu'il manquait encore quelque chose à ses plaisirs et à sa joie, je travaillai sans crainte à la contenter, tout en songeant que je valais bien l'amant de Pasiphaë. Cette femme, du reste, avait de telles dispositions aux plaisirs de Vénus, et était si insatiable de voluptés, qu'elle employa la nuit entière à mes dépens."
L'ironie de l'histoire est qu'ayant recouvré son apparence humaine, Lucius ira de nouveau rendre visite à la dame qui l'éconduira sans pitié en lui disant : " Par Jupiter, ce n'est pas toi, c'est de l'âne que j'étais amoureuse ; c'est avec lui et non avec toi que j'ai couché : je pensais que tu avais conservé le bel et grand échantillon qui distinguait mon âne."  gamiani-3.jpg  
  

Sam 16 fév 2008 Aucun commentaire