Vendredi 2 octobre 2020 5 02 /10 /Oct /2020 08:00

Elena FERRANTE, "La vie mensongère des adultes" (Editions Gallimard, 2019)

Roman de 404 pages traduit de l'italien par Elsa Damien

Extrait pages 91-92 : Giovanna, la narratrice, âgée alors de 13 ans, accompagne sa tante Vittoria au cimetière pour voir la tombe d'Enzo, son amant, qui fut l'amour de sa vie. Et voici ce qu'elle raconte à sa nièce :

" - Tu sais ce qu'on fait, entre hommes et femmes ?

- Oui

- Tu dis oui, mais tu ne sais rien. On baise. Tu connais ce mot ?

Je sursautai

- Oui.

ferrante-vie mensongere- Enzo et moi, on a fait ça onze fois en tout. Puis il est retourné auprès de sa femme et ne je l'ai plus jamais fait avec personne. Enzo m'embrassait, me touchait, me léchait partout, et moi aussi je le touchais et l'embrassais jusqu'aux doigts de pied, je le caressais, le léchais, le suçais. Puis il m'enfonçait sa bite bien à l'intérieur et il me tenait le cul avec ses deux mains, une sur chaque fesse, et il me ramonait tellement fort qu'il me faisait crier. Si toi ça, dans toute ta vie, tu ne le fais pas comme moi je l'ai fait, avec la passion que j'y ai mise et l'amour que j'y ai mis, je ne dis pas onze fois mais au moins une, alors ça ne vaut pas la peine de vivre. Dis-le à ton père : " Vittoria a dit que, si je ne baise pas comme elle a baisé avec Enzo, il est inutile de vivre." Tu dois le lui dire excatement comme ça. Il croit qu'il m'a privée de quelque chose, avec tout ce qu'il m'a fait. mais il ne m'a privée de rien, moi j'ai tout eu, moi j'ai tout. C'est ton père qui n'a rien.

Je ne suis jamais parvenue à effacer ces paroles. Elles avaient surgi de façon inattendue, je n'aurais jamais imaginé qu'elle puisse me dire ça. Certes, elle me traitait comme une grande, et j'étais contente que, dès le premier instant, elle ait écarté la manière dont on parle habituellement à une fille de treize ans. Mais ses propos me surprirent tant que je fus tentée de me plaquer les mains sur les oreilles. Je ne le fis pas, je demeurai immobile, et je ne parvins même pas à me soustraire à son regard qui cherchait sur mon visage l'effet de ses paroles. Je fus donc bouleversée physiquement -oui, physiquement - par le fait qu'elle me parle ainsi, là, dans le cimetière, devant le portrait d'Enzo, sans se soucier qu'on puisse l'entendre. Ah, quelle histoire. Ah, apprendre à parler ainsi, hors de toutes les conventions qui avaient cours chez nous. Jusqu'alors, personne ne m'avait raconté - à moi, rien qu'à moi - une adhésion au plaisir aussi désespérément charnelle, j'étais sidérée. J'avais ressenti dans le ventre une chaleur beaucoup plus intense que celle que j'avais éprouvée quand Vittoria m'avait fait danser. Et il n'y avait rien de comparable avec la douceur de certains bavardages secrets auxquels je me livrais avec Angela (son amie), ou avec la langueur que me causaient certains de nos enlacements récents, quand nous nous enfermions dans la salle de bains, chez elle ou chez moi."

Par michel koppera - Publié dans : lectures x - Communauté : Fantasmes et écriture
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