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Régine Deforges : "Lola et quelques autres" est un recueil de 13 nouvelles (chacune a pour titre un prénom féminin commençant par le lettre L et pour cadre un quartier de Paris) parues en 1979 aux Editions Jean Goujon. On peut trouver ce recueil en Livre de poche n° 5596 ( 219 pages)
Extrait. Lucette ou la belle crémière de la rue Mouffetard
Lucette est amoureuse de Victor, le boucher. Elle le retrouve pendant la pause d'un après-midi d'été.
" Victor enfonçait sa bouche sentant la viande grillée et le vin dans son cou, puis entre ses seins qu'il palpait comme il devait palper un bœuf pour apprécier la qualité de la bête. Un jour, d'ailleurs, voulant complimenter Lucette sur la beauté et la douceur de sa peau, il lui avait dit au plus fort de leur étreinte amoureuse :
− Ah ! quelle belle viande !
Au lieu d'agacer Lucette, cela l'avait considérablement excitée. C'est elle qui insistait pour qu'il ne lave pas le sang de ses mains avant de la caresser. Une fois, elle avait failli devenir folle de plaisir quand, pressé par le temps, il l'avait bousculée sur le billot de la boucherie sans même prendre la peine d'écarter la viande sur laquelle il était en train de travailler et, lui relevant les jambes à hauteur des épaules, l'avait besognée avec une force qui faisait trembler la lourde table. Elle avait éprouvé, au contact de cette chair morte d'où montait une odeur fade et à celle vivante, chaude, de l'homme sur laquelle roulaient des gouttes de sueur âcre et salée, une volupté jamais attteinte. Depuis, quand elle croisait des bouchers, aux vêtements, aux mains et quelquefois au visage poisseux de sang, portant d'énormes quartiers de viande saignante, elle éprouvait un orgasme rapide qui lui laissait les jambes molles.
Au début de leur liaison, Victor s'était amusé de ce qu'il appelait "ses lubies". maintenant, quelquefois, ça lui donnait envie de l'envoyer "se faire voir ailleurs". Mais, il revenait toujours à de plus aimables sentiments : Lucette avait un cul et des seins comme il les aimait. Du plus loin qu'il se souvenait, il n'en avait jamais vu d'aussi gros ni d'aussi fermes en même temps. Imaginez des tétons aux pointes d'un rose si tendre qu'on aurait dit du veau, et se dressant à la moindre caresse, débordant largement des deux mains réunies, et quelles mains ! des mains de boucher, au sillon si confortable que plus d'une fois il y avait glissé son sexe. Quant au cul ! ... ah, ce cul !... il aurait fallu que le boucher fût poète pour lui rendre un hommage digne de son opulence, de sa douceur, de sa fermeté, de sa blancheur, de son parfum. Le cul de Lucette sentait la crème fraîche, la paille de la litière, le foin dans la mangeoire."
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