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"Ball-trap" # 3/9
On observait les oiseaux sauvages du haut d'une sorte de mirador caché dans les frondaisons des grands arbres qui bordaient le lac. On y accédait par une échelle de bois très pentue puis on parvenait à une sorte de plate-forme carrée, fermée par des palissades de rondins qui dissimulaient les observateurs aux animaux en liberté. On pouvait y tenir à une dizaine de personnes. Au centre de la plate-forme, il y avait une table en bois très rustique avec des bancs tout aussi rudimentaires. Le toit en bardeaux recouverts d'un camouflage militaire protégeait de la pluie et des regards indiscrets. Marianne m'a tendu une paire de très puissantes jumelles montées sur trépied :
- Regardez là-bas, à droite, dans les roseaux... Vous voyez les aigrettes et le héron à l'affût ?
Effectivement, ils étaient là. J'avais l'impression de n'être qu'à quelques mètres. Il y avait même une cane colvert avec toute sa nichée en livrée jaune et noire qui la suivait en file indienne.
Je venais de voir se poser sur le lac un garrot à œil noir lorsque j'ai senti comme une pression sur mes hanches. Le poids d'un corps chaud et insistant contre le mien. Je n'osais bouger, paralysée par une angoisse sourde. J'entendis une voix douce si près de mon oreille gauche que je sentis son souffle dans mes cheveux:
- Ils ne nous regardent pas... Laisse-toi faire...
Abandonnant un instant mes jumelles, j'ai jeté un rapide regard derrière moi, sur ma droite. Effectivement, Daniel et l'Ardennais nous tournaient le dos et, longue vue à la main, observaient la rive opposée du lac. À peine avais-je repris mes jumelles que la main de Marianne rampa comme un serpent sur ma cuisse à la recherche de ma peau nue. Elle souleva silencieusement l'ourlet de ma robe.
Cette fois, c'en était trop. Me dégageant avec force, je me suis écartée de l'effrontée, bien décidée à mettre un point final à ses avances saphiques.
- Il commence à faire froid, ai-je déclaré d'une voix que je voulais ferme. J'aimerais rentrer.
Joignant le geste à la parole, je me suis dirigée vers l'échelle de bois pour redescendre, mais je n'eus pas le loisir de l'atteindre. En quelques pas, comme s'ils s'attendaient à ma tentative de fuite, Daniel et l'Ardennais m'ont barré le chemin.
- On ne s'en va pas comme ça, ma petite dame, ce n'est pas très poli. On est venus observer les oiseaux... Alors, on va les observer tous ensemble... On a apporté tout le matériel pour... Marianne, montre-lui !
Elle s'est emparée du petit sac à dos qu'elle portait sur le sentier forestier qui nous avait menés du parking où nous avions abandonné le 4X4 au mirador en bordure du lac. J'avais bien remarqué ce sac et je croyais naïvement qu'il ne contenait que des boissons fraîches et des bricoles sans importance. Elle le posa sur la table de bois et en sortit pêle-mêle un rouleau de ruban adhésif, un jeu de cordelettes blanches, une écharpe de tissu noir, un gros tube au contenu mystérieux, une boite de gants chirurgicaux en latex...
à suivre...
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