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La Meute ( chapitre 3 )
Le lendemain matin, après le petit déjeuner, Gaétan réunit tous les hommes au chenil afin de nous briefer sur la partie de chasse :
- On commence à dix heures. Fin de partie à seize heures précises. On va vous attribuer un poste que vous ne devrez en aucun cas quitter de la journée sans m’en avertir. Surtout, ne vous aventurez pas dans le sous-bois, même pour pisser ! Un accident est vite arrivé. Vous serez tous postés à un croisement d’allées : si le gibier passe, en principe, vous ne pourrez pas le rater. Faites confiance aux chiens et aux rabatteurs, ils connaissent leur boulot. Pour terminer, un petit problème : pour cette journée, je n’ai pu obtenir que six bagues. Ce qui veut dire, comme vous l’avez compris, que parmi nous, il y en aura au moins un qui ce soir n’aura rien tué. Dois-je vous rappeler notre règle : celui qui est bredouille doit en contrepartie offrir sa compagne au tableau de chasse. Ceci étant dit, messieurs, bonne chasse et que le meilleur perde !
En milieu de matinée, un quatre-quatre nous dépose, Sofia et moi, au poste d’affût que nous avons tiré au sort. Nous nous trouvons au croisement de deux très larges allées dont on ne voit pas la fin qui se perd sous les arbres. Avant de nous laisser, on nous donne les dernières consignes :
- Vous n’avez le droit de tirer que le chevreuil et le cochon. Si vous avez tué, vous cornerez deux fois ; par contre, si la bête est simplement blessée, vous ne devez corner qu’une fois. Vous ne bougez pas de là avant qu’on vienne vous rechercher vers seize heures. Bonne journée.
Il y a plus pénible comme situation que de rester plusieurs heures, en pleine nature, en compagnie d’une jeune femme plutôt bien foutue, surtout quand on a déjà joui dans sa bouche au cours de la nuit précédente. Pour l’occasion, Sofia a fait dans la tenue de camouflage, façon ni vu, ni connu : veste fauve, bottes de daim, pantalon et casquette marron. Je lui ai trouvé un fusil assez léger dont elle n’est pas peu fière, même si elle ne sait pas trop comment le tenir. C’est sûr, elle est plus à l’aise avec une bite dans la main !
Ce jour-là, le ciel est bas, mais il ne pleut plus. L’air est saturé d’humidité et d’odeurs de champignons. Il ne faut pas parler fort. De temps à autre, on entend au loin les aboiements de la meute des chiens qui viennent peut-être de lever un gros gibier. Vers midi, il y a une série de coups de feu, à l’ouest, puis des sonneries de corne, mais nous n’entendons pas très bien. Quand Sofia a une envie pressante, elle me tourne le dos et s’accroupit au bord de l’allée et je vois pour la première fois en pleine lumière ses fesses nues, deux globes de peau claire d’où jaillit en leur milieu un jet d’urine fumante dans l’air froid de novembre. Je me mets à bander. Avant même de lui laisser le temps de se reculotter, j’ai les doigts dans sa fente, elle a ma bite en main. On s’embrasse. C’est cet instant précis que choisit un gros sanglier pour traverser l’allée, à même pas vingt mètres de nous. Il s’arrête même quelques secondes pour nous jeter un regard, et peut-être nous narguer. Evidemment, dès que nous bougeons pour nous emparer de nos fusils, il disparaît en trottinant dans le sous-bois.
Pendant les deux heures qui suivent, il ne se passe plus rien. On se sent tous les deux un peu stupides, voire inutiles. Je bande toujours, mais plus question de se tripoter. Sofia m’observe de coin de l’œil, avec un soupçon de malice. Enfin, alors qu’on n’y croit plus, les aboiements des chiens se rapprochent : ils viennent droit vers nous. On entend distinctement les clameurs des rabatteurs qui excitent et encouragent la meute.
- Tiens-toi prête, dis-je tout bas à Sofia. Ça peut déboucher à tout moment. Je te laisse tirer la première. Saisis ta chance !
Tout se déroule très vite : un beau chevreuil surgit du sous-bois, un mâle âgé de trois ou quatre ans. Sofia épaule, tire deux fois. La bête fait un bond de côté et poursuit sa course. J’ai encore eu le temps de lui tirer dessus une fois avant qu’elle ne disparaisse sous les arbres…
- Je suis désolée, dit Sofia, je ne suis pas faite pour ça !
- Ce n’est pas grave.
Et pourtant…
À suivre…
© Michel Koppera, juin 2010
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