"Les ardents de la Rue du Bois-Soleil", # 6
Samedi 30 novembre 1963
Cet après-midi, je suis allée avec la maman de Tristan acheter les pelotes de laine pour le pull-over. Qu’est-ce qui m’a prise de lui proposer de tricoter ce pull ?
Lorsque je repense à jeudi dernier, j’en ai encore le cœur tout chaviré de honte et de désir.
La maman avait mis les petits plats dans les grands, j’ai même eu droit au salon qui sent l’encaustique et le renfermé. J’imagine que les étagères du buffet sont pleines de verres en cristal et de ménagères en argent qui n’ont jamais servi. Et ce papier peint, ces tableaux au mur, quelle horreur ! Comment peut-on aimer de telles niaiseries !
Tout cela aurait été risible et dérisoire s’il n’y avait eu Tristan. Au premier regard, j’ai senti gonfler mes seins et durcir mon clitoris. Je crois que si je m’étais touché les mamelons, j’aurais atteint l’orgasme sur le champ.
Quel courage il m’a fallu pour ne plus poser les yeux sur lui, pour faire comme s’il n’était qu’un enfant comme les autres, pour entretenir un semblant de conversation avec cette maman si délicieusement innocente ! Quand elle a demandé aux deux garçons de nous laisser seules, je l’aurais à la fois embrassée et maudite : en même temps qu’elle me libérait de l’étau du désir, elle me privait de la présence charnelle de son fils.
Pendant plus d’une heure, nous avons parlé, surtout elle. Devançant sa curiosité, je lui ai d’abord raconté en quelques mots l’histoire lamentable de mon mariage : les promesses et les serments, l’impression d’abandon longtemps masquée par l’illusion du confort matériel, la puis les maîtresses de mon mari, et pour terminer l’humiliation des coups presque quotidiens… Elle a compati, les larmes aux yeux. Ces confidences ont été pour elle comme une délivrance. En retour, elle m’a confié ses doutes sur la fidélité de son mari représentant en assurances, ses angoisses de maman poule, son regret d’avoir abandonné trop tôt ses études, sa peur du cancer du sein et du fibrome… La conversation est revenue presque naturellement aux enfants. J’ai senti qu’il y avait quelque chose qui la tracassait et qu’elle n’osait pas… Alors, elle s’est mise à me parler comme à un médecin, quelqu’un qui détient toutes les réponses. C’était à propos de Tristan, elle était inquiète. Elle m’a parlé d’un magazine pornographique qu’elle avait découvert dans sa chambre, en haut de son armoire. Rien que des femmes nues ! Et aussi de mouchoirs comme empesés de sperme séché. Elle ne savait pas si c’était normal. Je l’ai rassurée : rien de grave. C’est l’âge où les adolescents découvrent leur propre corps. Cela passerait. D’ailleurs, son amitié avec Jean ne pourrait lui faire que du bien, il penserait à autre chose…
Ainsi, il se branle, le petit salaud ! De nouveau, j’ai senti la pointe de mes seins et mon clitoris devenir durs comme de la pierre. J’ai même eu peur qu’elle s’en aperçoive… N’empêche que c’est moi qui ai mis cette histoire de pull-over sur le tapis, juste pour le voir une dernière fois avant de partir, pour le toucher enfin.
Je me revois, le mètre ruban à la main, tournant autour de lui comme autour d’un totem, respirant son odeur, osant à peine poser les doigts sur sa nuque duveteuse. Sa bise maladroite d’au revoir m’a inondé le ventre de bonheur
De retour à l’appartement, je me suis enfermée aux toilettes pour me branler. À peine les doigts posés au bord de ma vulve poisseuse, l’orgasme est venu, presque spontanément.
Mon Dieu, qu’est-ce que je raconte ! Il faut absolument que j’arrête de penser à lui, ce n’est qu’un gamin !
Fin du chapitre 1
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