Mercredi 11 novembre 2009
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Baiser dans une laverie automatique
Prélavage. Ils sont arrivés presque ensemble, chacun portant son lourd balluchon de linge sale. Des draps, des
torchons, des serviettes de table, du blanc, 100 % coton grand teint, à laver à 90 ° C. Cycle long, une bonne heure et demie, mais ils ne sont pas pressés. Comme tous les mercredis, ils sont
venus à la nuit tombée. Ils ont leurs petites habitudes, comme d’utiliser toujours les mêmes machines, la 5 et la 6, celles qui se trouvent dans le fond de la laverie, loin de l’entrée et de ses
néons, dans une sorte de renfoncement presque discret. Ce soir, elle porte une petite robe à fleurs - 62 % coton, 38 % polyamide – et lui un jean classique à laver avec coloris similaires et un
T-shirt jaune à repasser à l’envers. Ils choisissent leur programme de lavage et achètent leurs doses de lessive : il en prend une demi-dose de plus qu’elle, par peur des taches tenaces.
Quand il se penche pour charger sa machine, elle ne peut s’empêcher de regarder ses fesses que moule son jean et ça lui fait quelque chose, exactement comme la première fois… Elle sait aussi
qu’il a regardé ses jambes nues et surtout la courbe de ses reins quand elle s’est accroupie devant le hublot pour enfourner son linge sale. D’un même geste, ils ont appuyé sur le bouton de mise
en marche, les voyants rouges et verts se sont allumés, les pompes à eau sont entrées en action, les tambours se sont mis à tourner…
Lavage. Par les hublots, on peut observer les roulades du linge dans les tambours. À chaque pause, on entend le
grignotement du programmateur pendant que la mousse ruisselle sur la vitre du hublot. Ça l’excite, cette écume blanche lui fait penser à du sperme monté en neige. Debout, les jambes écartées, les
mains posées sur le bord de la machine, elle regarde par le hublot la danse de sa lessive. À genoux derrière elle, le visage entre ses fesses nues, il la lèche et sa langue en vrille tourne et
tourne encore à l’entrée de son vagin, et à chaque tour effleure le boutons pâle de son clitoris qui égrène, frisson après frisson, les minutes du plaisir. À la deuxième eau, c’est à elle
d’entrer en action. Elle le prend en bouche, le suce, l’aspire, le décape de la tête du gland à la racine couillue. D’une main posée dans ses cheveux, il la retient, tente de garder le contrôle…
Puis, ils s’embrassent, debout contre les machines qui vidangent. Le ronronnement des pompes à eau accompagne leur baiser. Ils se tiennent quasiment immobiles ; sa queue raide et encore
mouillée de salive palpite entre ses cuisses entrouvertes et bat contre sa vulve chaude et humide. Ils s’embrassent en silence. À ce moment-là, ils s’aiment vraiment.
Rinçage. Maintenant les clapots de l’eau ne sont plus étouffés par la mousse de la lessive et se mêlent au ressac
mouillé des deux sexes en quête de plaisir. Elle est trempée. Les fesses sur le capot de la machine n° 6, les jambes pendantes, elle se laisse prendre par les douces vibrations du tambour qui
parcourent son ventre en tous sens, résonnent dans son bassin où elle sent chaque os frémir. Il est debout entre ses cuisses ouvertes, il la tient par les hanches. Sa bite est devenue électrique,
maintenue en pleine charge par un imperceptible tressaillement qui lui frise en continu le scrotum… Leurs bouches ne se quittent plus, leurs langues brassent leurs salives mêlées. À intervalles
réguliers, le tambour marque une pause, alors, pendant quelques instants, on n’entend plus que le bouillonnement de leurs sexes enflammés.
Essorage. Quand arrive la dernière vidange, ils sont prêts, ils n’attendent plus que ça. Ils retiennent leur
souffle. La machine s’élance, comme pour un long sprint…1500 tours minute. De quoi lui affoler le vagin. L’orgasme monte à toute vitesse, fulgurant. Elle a même tout le temps de s’en offrir un
second. Il n’a plus besoin de bouger. Sa queue sismique grésille, ses couilles se fripent, leurs pelvis s’horripilent de bonheur, son clitoris s’illumine, son sperme jaillit en gerbe
d’étincelles… Fin du programme.
Séchage. Pendant qu’ils transfèrent leurs lessives dans les sèche-linge, ils se regardent en souriant. Sous sa
jupe, le long de sa cuisse gauche a coulé un filet de sperme encore tiède qu’il a tendrement essuyé avec un mouchoir en papier. En attendant, assis côte à côte en face des machines, ils échangent
quelques nouvelles : ils parlent du temps qu’il fait, du travail qui se fait rare, de leurs enfants, d’improbables projets pour des vacances lointaines… Ils se prennent parfois la main,
presque furtivement… Je les croise alors qu’ils quittent la laverie, chacun portant son lourd balluchon de linge.
- Bonsoir, alors vous aussi vous êtes de corvée le mercredi soir, me dit-elle. Je vois que vous avez déjà fait une petite lessive à la
main, mais il reste une belle tache, là, sur votre pantalon !
À l’arrêt de bus, ils se serrent la main et se séparent : elle monte dans le bus de la ligne 12, il continue à pied vers le
boulevard.
© Michel Koppera, août 2009
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