Lundi 4 mars 2019 1 04 /03 /Mars /2019 08:00

Pauline Bonaparte - qui se prénomma d'abord Paola-Maria - est née à Ajaccio le 20 octobre 1780. Sexuellement précoce, à 12 ans, elle était selon les chroniqueurs déjà "formée et apte au déduit". L'ascension irrésistible de son frère aîné lui donnera l'occasion de satisfaire ses insatiables appétits charnels. Supposées, fantasmées ou réelles, ses aventures amoureuses ont nourri la littérature et les pamphlets. Une chose semble cependant acquise : Pauline était nymphomane comme l'atteste la lettre confidentielle qu'adressa le 22 avril 1807 Jean-Noël Hallé, membre de L'Institut et premier médecin ordinaire de Napoléon au docteur Peyre, médecin personnel de Pauline Bonaparte à la suite d'un examen partiqué la veille. En voici un large extrait :

Mon cher confrère,

"J'ai continué de réfléchir sur l'état dans lequel j'ai trouvé Son Altesse (Pauline), et dans lequel nous l'avons trouvée hier. Cet état est celui d'une affection hystérique (rappelons que le mot hystérie est dérivé du mot utérus !

La matrice était moins sensible, mais l'était encore ; les ligaments conservaient encore l'impression de cette douleur d'irritation pour laquelle nous l'avions fait mettre dans le bain jeudi dernier.

Les spasmes que j'ai vus dans les bras étaient des spasmes hystériques, la douleur de la tête était hystérique. L'aspect général est celui de l'abattement et de l'épuisement.

Ce n'est point là une inflammation ordinaire, l'état inflammatoire que nous avons vu n'était que passager. L'état habituel et constant est un état d'excitation de l'organe utérin, et cet état soutenu et continu peut devenir fâcheux. 

Voilà le mal ! J'ai touché les causes en parlant à demi-mot à la princesse, jeudi dernier. J'ai accusé les douches internes, et j'ai parlé d'une manière générale de tout ce qui portait de l'irritation sur la matrice, de quelque nature qu'il fût ! Je crois avoir été entendu, mais j'ai peur de ne pas l'avoir été assez. (...) On ne peut pas toujours accuser la douche et son tuyau, il faut bien supposer dans une femme jeune, jolie, sensible, solitaire, et qui s'épuise visiblement, une cause subsistante de cet épuisement. 

Quelle que soit cette cause, il est temps et plus que temps de l'écarter. J'ai vu des femmes victimes de pareilles faiblesses, elles ont toutes commencé comme cela "

Voyez comme les choses étaient joliment dites et enveloppées : Si je reprends les passages que j'ai repérés en caractères gras : 

1) L'état habituel de Pauline était d'être sexuellement excitée et d'avoir envie de baiser.

2) Pour tenter de calmer ses désirs, elle se faisait des lavements vaginaux.

3) Comme élle était seule, elle passait son temps à se masturber et ces séances de plaisir solitaire étaient la cause principale de son épuisement. 

De Pauline, il nous reste quelques portraits comme cette toile de Robert Lefèvre, datée de 1809...

pauline-bonaparte-par-robert-lefevre-vers-1809

... et surtout  "Vénus Victrix" la célèbre sculpture en marbre de Canova pour qui Pauline avait posé nue entre 1805 et 1808 (et franchement, l'envers vaut l'endroit !) 

Pauline-Bonaparte-Borghese

pauline-bonaparte

Ajoutons pour terminer que Pauline Bonaparte, épouse Borghèse, mourut à Florence le 9 juin 1825 (elle allait avoir 45 ans !)

Par michel koppera - Publié dans : jadis et naguère - Communauté : Fantasmes et écriture
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Vendredi 1 mars 2019 5 01 /03 /Mars /2019 08:00

Le saviez-vous ? # 121

Saviez-vous que l'exobiophilie est une paraphilie qui se manifeste par le fait d'être sexuellement attiré par les créatures extraterrestres. Par extension, ce fantasme matériellement irréalisable se nourrit aussi du plaisir  et de l'exctitation à regarder des films, des images ou à lire des récits qui mettent en scène des jeux sexuels ou accouplements entre êtres humains et créatures extraterrestres. 

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Par michel koppera - Publié dans : le saviez-vous ? - Communauté : Arts érotiques
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Mercredi 27 février 2019 3 27 /02 /Fév /2019 08:00

A comme abricot

La recette du jour : Abricots au sirop 

Ingrédients : 8oo g d'abricots, 250 g de sucre en poudre, 5 cl d'alcool (rhum ou kirsch), 20 cl d'eau

Dénoyautez les abricots puis cassez une dizaine de noyaux pour en extraire les amandes que vous mettez à tremper dans l'alcool quelques heures.

Préparez un sirop en faisant bouillir ensemble l'eau et le sucre. Placez les abricots dans le sirop puis laissez-les cuire 5 minutes à petits bouillons.

Laissez refroidir le sirop puis retirez les abricots et placez-les dans un plat.

Faites épaissir le sirop à feu doux. Après quelques minutes, ajoutez l'alcool parfumé aux amandes d'abricots (sans les amandes) puis laissez refroidir.

Nappez les abricots avec ce sirop et servez aussitôt.

abricot1

Par michel koppera - Publié dans : lexique coquin - Communauté : Arts érotiques
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Lundi 25 février 2019 1 25 /02 /Fév /2019 08:00

"Villa Ferjac"

chapitre 7

Aujourd’hui, Marie est arrivée à neuf heures précises, comme d’habitude. L’étudiant en médecine à qui j’ai loué tout le second étage rentrera peut-être ce midi pour déjeuner avec moi. Sur le bureau, j’ai ouvert le premier tome du De Natura Rerum de Lucrèce :

«  Aeneadum genitrix, hominum divumque voluptas

Alma Venus… »

Après avoir préparé le repas de midi, Marie a lavé la vaisselle, passé la serpillière dans la cuisine et l’aspirateur dans les chambres et le salon. Elle a changé les serviettes des salles de bains, récuré les lavabos et les cuvettes des toilettes, fait briller les robinets…

Puis elle est venue me rejoindre. Comme d’habitude, elle reste debout. Ce matin, elle porte une courte robe de cotonnade bleu nuit imprimée de petites fleurs jaunes. Elle appuie ses cuisses sur le bord du bureau, de telle sorte que cette douce pression révèle l’arrondi de son ventre et, plus précisément, le renflement de son pubis.

Elle me regarde écrire. Il y a des phrases qui résistent à la traduction, des mots qui ne se laissent pas lire aussi facilement que Marie. Alors, elle attend, elle n’est pas pressée.

Quand c’est terminé, elle se penche en avant et tout le poids de son corps pèse sur le bord du bureau. Sa poitrine alourdit le coton de sa robe, lisse les plis du tissu. Son visage est maintenant tout près de ma nuque que frôle son souffle paisible. Marie pose sa main sur la mienne. On reste comme ça quelques instants. C’est merveilleux.

ferjac7Enfin, elle se redresse, s’éloigne lentement vers la porte et je la suis, à quelques pas en retrait pour mieux me repaître du galbe de ses mollets, du roulement alterné de ses fesses qui balance les plis de sa robe de gauche à droite. On longe le couloir qui mène à la chambre où elle n’a pas encore fait le lit, mais juste repoussé la couverture et le drap au pied. Dès que j’ai refermé la porte derrière nous, elle déboutonne sa robe. Elle est nue là-dessous. Marie a la peau blanche, les cheveux châtains et un peu bouclés, des seins en pomme avec des aréoles pâles, de belles cuisses rondes, un fessier généreux, un ventre doux comme celui d’un bébé, un sexe aux lèvres épaisses et légèrement violacées.

Elle s’étend sur le lit. Pendant que je me déshabille, elle se caresse, se titille le bout des seins, se peigne la touffe avec les doigts et se masse langoureusement le clitoris. Mais son visage placide n’exprime aucune émotion, aucun désir.

Pourtant, comme tous les autres jours, je bande. Je m’approche du lit, elle m’attrape par la queue.

- J’ai envie.

Ce sont ses premiers mots, toujours les mêmes, ceux qui me mettent hors de moi. Marie mouille. Elle sent bon, très bon. Elle sent bon partout : je la renifle des aisselles à l’entrefesses. J’y pose les yeux, les doigts, les lèvres et le bout du gland qu’elle enduit de salive. Elle ouvre les cuisses en grand afin que fleurisse sa vulve de nacre rose. Je m’allonge entre ses jambes écartées et mon sexe la pénètre, tout seul, comme téléguidé par les ondes pulpeuses de son ventre en éveil. On baise. Elle jouit en me tenant les fesses à pleines paumes. Elle gémit, grimace un peu de plaisir. Je lui lâche tout au fond du vagin.

Je la regarde refaire le lit, les fesses à l’air, la queue basse.

- On changera les draps demain ! décide-t-elle en rajustant le couvre-lit. Vous savez, je suis heureuse…

Un ange passe. Elle reboutonne sa robe à fleurs.

- Dans les derniers temps, M. Bertholet ne me faisait plus jouir… Enfin, plus comme avant.ferjac7-1

De la fenêtre, on devine la mer toute proche, et je peux surveiller le portail que vient de refermer Marie… Parfois, des enfants à bicyclette passent dans l’Allée des Cormorans ; ils s’arrêtent quelques instants devant les grilles closes et jettent des regards curieux sur le parc à l’abandon.   

FIN  

© Michel Koppera, février 2019        

 

     

Par michel koppera - Publié dans : inédits - Communauté : Fantasmes et écriture
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Vendredi 22 février 2019 5 22 /02 /Fév /2019 08:00

"Villa Ferjac"

chapitre 6

ferjac6-1Ma relation amoureuse avec Valérie fut à la fois plus frustre et plus riche que celle que j’avais vécue avec Clara. Alors que Clara aimait habiller l’amour de fantasmes – cela allait du porte-jarretelles au préservatif aromatisé, en passant pas les accessoires en latex – Valérie se contentait d’être intégralement nue et consentante. Elle avait le ventre châtain et bouclé, tout comme les aisselles et sa chevelure opulente. Elle aimait que je lui caresse le pointe des seins et le bas des reins, que je l’embrasse dans le cou, juste sous l’oreille, que je passe ma main tout doucement entre ses cuisses entrouvertes, que je prenne et que j’excite son clitoris entre mes lèvres pincées, que je lui maintienne les jambes très écartées pendant que je lui léchais la chatte et le trou du cul, que je lui dise que c’était bon quand elle me prenait en bouche, que je la pénètre à fond, que je la fasse jouir plusieurs fois de suite, que je me retire de son con tout luisant de son plaisir pour la lui mettre par derrière, que j’éjacule en grognant de bonheur, qu’on recommence en pleine lumière, la fenêtre ouverte… Elle aimait tout ça et aussi se regarder nue dans le miroir en prenant la pose tout en se caressant du bout des doigts.

Début juillet, le matin de notre départ pour un séjour de trois semaines en Toscane, M. Bertholet nous accompagna jusqu’aux grilles du portail qu’il referma derrière nous. Il nous adressa un dernier signe de la main. Je ne devais jamais le revoir.

Malgré le charme de la vie florentine, malgré la splendeur des marbres de la chapelle des Médicis, ce voyage tourna rapidement au désastre. Valérie me reprochait sans cesse mes silences et d’oublier trop souvent sa présence ; je supportais mal ses bavardages et ses fréquentes haltes devant les vitrines des maroquiniers. En fait, nous n’avions jamais vraiment vécu ensemble, je veux dire tous les deux. Nous ne connaissions que l’intimité trompeuse du lit. Notre réelle séparation eut lieu à la Galerie des Offices, devant l’Annonciation de Botticelli ; comme je restais en admiration devant le tableau, fasciné par le damier rouge et blanc du dallage aux pieds de la Vierge et de l’Archange, Valérie me chuchota à l’oreille :

- Je continue toute seule… On se retrouve plus tard.

Ce fut ainsi qu’elle quitta ma vie, comme l’avait fait Clara trois années auparavant.

Je poursuivis seul le voyage.

De retour à la villa Ferjac, j’ai trouvé les portes verrouillées, les persiennes closes, la maison désertée. Dans la bibliothèque, tous les livres étaient rangés, en bon ordre, et il ne restait sur le bureau de chêne qu’une simple feuille de papier blanc, sans le moindre mot d’explication. Quelques cintres avaient été jetés sur le matelas de la chambre mauve dont l’armoire ouverte à deux battants découvrait ses étagères vides. Un léger voile de poussière semblait s’être posé sur la table de chevet où le réveille-matin avait cessé de battre la mesure.

Après de multiples coups de téléphone désemparés, j’ai fini par retrouver la trace de M. Bertholet. Selon le notaire, dès le lendemain de notre départ, il avait demandé à être admis dans la maison de retraite où sa place était réservée depuis la vente de la Villa Ferjac. Il y était décédé cinq jours plus tard, victime d’une paisible crise cardiaque. Il y avait dans la voix du notaire comme un reproche à peine voilé.

ferjac6-Botticelli, annunciazione di cestello

à suivre...

 

 

Par michel koppera - Publié dans : inédits - Communauté : Fantasmes et écriture
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Mercredi 20 février 2019 3 20 /02 /Fév /2019 08:00

"Villa Ferjac"

chapitre 5

Par curiosité plutôt que saisie d’un improbable remords, Clara était venue par deux fois nous rendre visite. Malgré l’extrême amabilité de M. Bertholet à son égard, elle en avait conclu que j’étais devenu définitivement cinglé et n’avait plus donné signe de vie.

ferjac5Lorsque je lui présentai Valérie, il y a maintenant six mois de cela, M. Bertholet fit montre de la même civilité que celle qui avait présidé aux visites de Clara. Pour l’occasion, il dérogea à la règle en acceptant mon invitation à dîner. Durant tout le repas, il fit preuve de beaucoup d’entrain et d’appétit, adressa des éloges flatteurs à la beauté de Valérie et, pour nous distraire, souleva le voile du mystère qui pesait encore sur les circonstances de la mort de Marius en 86 av J.C, écartant les hypothèses de l’assassinat ou du suicide, avant de nous décrire l’apothéose d’un coma éthylique à l’issue d’une beuverie fatale. Sous le charme, Valérie hésitait entre le rire et l’angoisse.

Cependant, le lendemain après-midi, alors que nous parcourions la grande allée sous les pins parasols, M. Bertholet me parut soucieux, presque inquiet, quand je lui annonçai que Valérie viendrait sans doute s’installer à la Villa Ferjac.

- C’est une décision grave, dit-il en fuyant mon regard. L’arrivée d’une femme dans la vie d’un homme est toujours un événement, à la fois un début et une fin… Vous ai-je déjà parlé de Volumnius Flamma, consul en 307 av J.C ?

Ce printemps-là, la présence quotidienne de Valérie dans la maison bouleversa toutes nos habitudes. M. Bertholet avait renoncé à son huis clos du rez-de-chaussée et passait maintenant la plus grande partie de la journée dans le parc et dans le jardin où Valérie avait aménagé des plates-bandes de fraisiers, semé des radis, et même planté un petit pêcher au pied d’un mur ensoleillé. Nos promenades au bord des vagues étaient devenues presque journalières et, le soir, il nous arrivait de dîner sous la tonnelle, dans la douceur du soleil couchant. Marie ne venait plus, mais M. Bertholet paraissait l’avoir oubliée, tout du moins ne fit-il jamais allusion à son absence. Ensemble, nous avions choisi la nouvelle couleur des persiennes qu’un artisan vint repeindre en bleu… Déjà, on envisageait des déplacements de meubles, de nouveaux papiers peints, le réaménagement de la cuisine devenue à nos yeux vétuste et malcommode… Dans tous ces projets, M. Bertholet se montrait le plus audacieux, le plus enthousiaste.

ferjac5-1

à suivre...

 

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Lundi 18 février 2019 1 18 /02 /Fév /2019 08:00

"Villa Ferjac"

chapitre 4

Chaque jour des trois années qui suivirent vit se renouveler avec le même bonheur la magie de notre rencontre.

J’avais investi les deux étages supérieurs, laissant à M. Bertholet  le libre usage du rez-de-chaussée. En fait, il ne quittait guère la bibliothèque que pour aller prendre du repos dans une chambre exiguë dont l’unique fenêtre donnait sur le jardin.

Dès que mon travail m’en donnait le loisir, je rentrais le midi pour déjeuner avec M. Bertholet. Nous étions servis par une jeune femme au visage niais qui arrivait chaque matin à neuf heures précises. Outre la préparation du repas, elle était aussi chargée des provisions et des tâches ménagères au rez-de-chaussée. M. Bertholet prétendait qu’elle s’appelait Marie. En trois années, je ne l’ai jamais entendue prononcer le moindre mot. Elle nous apportait les plats avec un sourire indifférent, vaguement stupide, comme si elle traversait l’existence en état d’hypnose.

Malgré les assiettes en faïence aux somptueux motifs d’un rose profond, malgré les couverts en argent et la nappe brodée, M. Bertholet ne prenait place à table qu’avec réticence. Il mangeait peu, sans précipitation, sans la moindre émotion. Un jour où je manifestais ma joie devant une coupe de fraises melba, il coupa court à mon enthousiasme :

- À votre place, je relirais Epicure. Vous avez dû en faire une lecture un peu trop rapide.

ferjac4 De nouveau seuls après le départ de Marie, quelle que fût la saison, nous ne manquions pas de faire une promenade paresseuse dans le parc sans toutefois nous approcher du portail donnant sur la rue… Tout en marchant à pas menus, M. Bertholet me contait l’histoire d’un homme politique remarquable de la Rome antique, comme celle de Lucius Papirius-Cursor, cinq fois consul, deux fois dictateur, et qui obtint à trois reprises les honneurs du triomphe après ses victoires face aux Samnites ; ou l’ironie du destin de Aulus Gabinius, homme lige de Pompée, tribun de peuple de 69 av J.C, consul en 58, qui avait condamné Cicéron à l’exil avant d’être défendu par sa propre victime…

Parfois, la pluie et le vent mêlés nous contraignaient à trouver refuge dans la serre où, sous les hautes fougères arborescentes qui se gorgeaient de lumière, il nous arrivait de découvrir la robe jaune et noire d’une salamandre et d’écouter les points d’exclamation d’un crapaud décidément invisible. M. Bertholet avait renoncé depuis longtemps aux plantes potagères et aux arbres fruitiers. Aussi le parc et le jardin étaient-ils livrés à la fantaisie des roses trémières, à l’étreinte des lierres et des clématites, à l’ivresse des sauges aux feuilles de velours pâle…

Aux premiers dimanches de printemps, nous descendions jusqu’à la mer. Seule concession de M. Bertholet au monde extérieur, nous marchions quelque temps au bord des vagues. De la pointe de sa canne, il traçait sur le sable humide un long trait continu que nous suivions au retour comme un fil d’Ariane entre les traces de nos pas inversés… Un jour où nous avions dû contourner une famille en train de pique-niquer bruyamment au pied de la digue, assise en cercle autour de sacs en papier éventrés et de boîtes multicolores de boissons gazeuses, il me dit malicieusement :

- Cela me fait penser qu’il faudra que je vous raconte la vie de Papirius Crassus, consul en 434 av J.C, et aussi celle de Valérius Poplicola au siècle suivant…

Puis, il se mit à rire. C’était la première fois que je le voyais ôter son masque austère. Le sourire plissait ses paupières derrière lesquelles s’effaçait son regard, découvrait ses dents de vieillard. J’aurais pu en être effrayé, mais cet éphémère accès de jovialité et d’humour me remplit d’une tendresse respectueuse et définitive.

 Dès notre retour à la Villa Ferjac, M. Bertholet se retirait dans ce qu’il appelait ses appartements. Pour tout dîner, il emportait une pomme, parfois un yaourt. Je gagnais le premier étage où je me laissais aller aux plaisirs solitaires et faciles de mon écran de télévision.

ferjac4-1

à suivre...

Par michel koppera - Publié dans : inédits - Communauté : Fantasmes et écriture
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Vendredi 15 février 2019 5 15 /02 /Fév /2019 08:00

"Villa Ferjac", chapitre 3

ferjac3-1Ayant dû pour des raisons professionnelles me rendre à Cologne puis à Milan, j’avais chargé une entreprise de procéder pendant mon absence au transfert à la Villa Ferjac des livres, de mes effets personnels et de quelques souvenirs plus intimes que j’avais pu sauver du naufrage de ma relation avec Clara. Cela tenait en peu de choses : il y avait d’abord un petit album photo qui contenait, outre les banals clichés de vacances ou de soirées d’anniversaires entre amis, une trentaine de photos où Clara avait posé nue pour moi. Ces images entretenaient la douleur de la rupture tant son corps y apparaissait désirable et délicieusement lascif. En partant, elle avait aussi oublié deux petites culottes – une sage en coton festonné, une autre plus canaille, stratégiquement ajourée – ainsi qu’une paire de bas noirs. Rien d’autre ? Ah si : un vieux magazine d’annonces échangistes, annoté de sa main, où elle avait elle-même sélectionné les quelques couples avec lesquels elle aurait aimé que nous partagions des nuits d’amour. Mais ses désirs n’allèrent pas plus loin qu’une lettre-réponse à une annonce qu’elle ne posta jamais.

Le jour de mon retour, un après-midi de novembre où soufflait une furieuse tempête de sud-ouest, j’eus la désagréable surprise de trouver les grilles du portail ouvertes à tout vent. La porte principale de la maison n’était même pas fermée à clef. J’étais encore à m’ébrouer dans le vestibule, maudissant la désinvolture des déménageurs, lorsque je découvris un rai de lumière filtrant sous la porte de la bibliothèque. Je sentis monter en moi une redoutable fureur.

Il était là, assis au bureau, penché au-dessus des livres, face à la fenêtre giflée par le vent et les giboulées. Je m’étais arrêté dans l’encadrement de la porte, stupéfait, incapable de détacher mon regard de son dos voûté, du pommeau de sa canne appuyée sur le bras du fauteuil…ferjac3-2

- Je sais ce que vous pensez, dit-il sans se retourner, mais je vous attendais avec impatience. Vous connaissez les élégies de Tibulle ? Alors, écoutez ceci :

« Crudeles Divi ! Serpens novus exuit annos :

Formae non illiam fata dedere moram. »

Mirabeau traduit ces deux vers par : « Dieux cruels ! Le serpent chaque année renouvelle sa robe ; mais le destin n’accorde aucun délai à la beauté. » Qu’est-ce que vous en dites ?

- Je ne sais pas… Il me semble que j’aurais plutôt commencé par « Divine cruauté ! », même si ce n’est pas la traduction littérale…

Et, au moment même où je prononçais ces mots, je sentis ma colère s’apaiser, mes nerfs se relâcher. Jamais plus je n’aurais la force d’exiger son départ.

à suivre...

 

 

Par michel koppera - Publié dans : inédits - Communauté : Fantasmes et écriture
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Mercredi 13 février 2019 3 13 /02 /Fév /2019 08:00

"Villa Ferjac "

Chapitre 2

Au cours de l’unique visite de la maison, quelques semaines avant la signature de l’acte de vente chez le notaire, je rencontrai enfin le propriétaire des lieux. Il était installé au rez-de-chaussée, dans une vaste pièce sombre. Sous la fenêtre, le bureau se nourrissait de toute la lumière du jour. Tout autour, les murs étaient tapissés d’ouvrages aux reliures de cuir odorant, à tel point que j’eus l’étrange sensation de pénétrer dans un immense sac à main. M. Bertholet m’avait tendu une main osseuse et froide.

ferjac2- Je vous trouve bien jeune pour vous encombrer d’une telle maison ! dit-il sans me regarder.

Assis au bureau devant deux livres ouverts, il écrivait.

- Maître Guyot vous a-t-il bien expliqué les conditions de vente ? reprit-il en posant son stylo au bord d’une page encore vierge.

Il se tourna vers moi. Dans le contre-jour brillaient ses yeux fatigués.

- Si j’ai bien compris, la maison est vendue meublée… Je m’engagerais à acheter l’ensemble, même la vaisselle, je crois.

- C’est cela ! À l’exception de mes effets personnels, bien entendu.

- Et il vous est indifférent de vous séparer de vos livres, de ces tableaux aux murs du salon ? Vous savez, si c’est une question d’argent, on peut trouver un arrangement… Je ne voudrais pas avoir l’impression de vous dépouiller.

Mais il ne me regardait plus, paraissait même ne plus m’écouter.

- Tout. Je vends tout, répéta-t-il avec conviction.

Devant mon désarroi, le notaire tint à me rassurer. Il m’attira un peu à l’écart.

- M. Bertholet reste seul, sans famille… C’est, comment dire, un original, une sorte d’antiquité, si vous préférez.

- Et après, où va-t-il s’installer ?

Le notaire avait haussé les épaules, évoquant une possible maison de retraite, quelque part dans le Sud… De toute évidence, il n’en savait rien.ferjac2-2

Notre seconde rencontre eut lieu un mois plus tard, dans l’étude feutrée de Maître Guyot pour la signature de l’acte de vente. Je vis enfin M. Bertholet en pleine lumière, assis en face de moi, le corps enveloppé dans un lourd manteau de ratine. De ses doigts maigres, il jouait avec une canne à pommeau d’ivoire posée sur ses genoux. Tout en prêtant une oreille distraite à la litanie procédurière du notaire, je regardai ses cheveux clairsemés aux boucles encore sombres, l’arête de son nez busqué, l’arc touffu de ses sourcils qui ombraient ses yeux cernés de rides sèches. Ses lèvres dessinaient une moue dédaigneuse, mais presque souriante, à l’adresse de Maître Guyot qui poursuivait sa lecture minutieuse. Quand il se leva pour la signature, il me parut à la fois très grand et immensément fragile, comme si un simple souffle de vent ou un mot trop brutal eussent suffi à le faire chanceler.

Il me revint alors en mémoire une leçon de latin avec un très vieux professeur que l’on admirait, peut-être parce qu’il semblait venu d’une autre époque, avec ses longs cheveux blancs, ses doigts déformés, ses rides qui lui déchiraient le visage, sa démarche lente et claudicante. Je le vois encore montrer avec sa canne le tableau noir, se retourner, l’œil vif et malicieux, et nous révéler avec un charmant sourire : « Fluctuat nec mergitur ».

à suivre...

 

 

 

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Lundi 11 février 2019 1 11 /02 /Fév /2019 08:00

"Villa Ferjac"

Cette nouvelle qui décevra sans doute les amateurs de scènes "hard" est la dernière qui devait composer le recueil "Cortisone Climax", recueil non publié suite au décès brutal de mon éditeur. Cette nouvelle écrite à la fin des années 80 fait directement référence à un épisode de ma vie qui date de l'année 1986. Pour des raisons professionnelles, j'avais été amené à habiter seul pendant près de six mois dans une grande villa très kitch construite au début du siècle (vers 1930) perchée en haut d'une falaise face à l'océan. Chaque soir, j'avais droit à un coucher de soleil grandiose sur les îles... Je garde de précieux souvenirs de ces mois de solitude presque monastique.

Chapitre 1

De la fenêtre de la chambre mauve, à deux pas du ciel lourd, on devine la mer. La maison est vieille maintenant, malgré ses persiennes fraîchement repeintes en bleu. Il me serait difficile d’expliquer en quelques mots comment j’en suis arrivé à ne plus quitter cette fenêtre sans horizon.

ferjac1

Lorsque j’ai acheté la maison, je venais de rompre avec Clara, ou, plus exactement, son départ avec la moitié de notre bibliothèque et sept années de souvenirs venait de mettre un point final à notre indifférence routinière. Plus rien ne nous attachait l’un à l’autre, pas même les joies du lit où nous avions partagé tant de moments heureux. Pourtant, mes doigts gardèrent longtemps en mémoire la douceur de son ventre de velours et, parfois, le parfum de son sexe pulpeux flottait encore dans mes draps de solitude.

Enfant, jamais je n’aurais imaginé que je puisse un jour franchir les hautes grilles du portail, pénétrer dans le parc et parcourir les allées sous les pins parasols qui dérobaient la maison aux regards des passants. Le visage de notre mère s’assombrissait lorsqu’au retour d’une de nos escapades printanières, nous lui avouions être passés par l’Allée des Cormorans pour faire halte quelques instants devant le portail toujours clos de la Villa Ferjac.

- Attendez que j’en parle à votre père quand il va rentrer ! Vous allez voir !

Elle nous promettait alors les pires châtiments. Mais, le soir venu, elle se gardait bien de lui en souffler mot, allant même jusqu’à nous adresser de muettes prières si, par hasard, notre père nous demandait où nous avions passé l’après-midi.

à suivre... 

Par michel koppera - Publié dans : inédits - Communauté : Fantasmes et écriture
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